Revue de détails des principales mesures du projet de réforme des retraites présenté par le Premier ministre le 27 août. Elles concernent l’ensemble des salariés du public et du privé, y compris les salariés qui relèvent de régimes spéciaux (SNCF, EDF, GDF…).
« Ce projet n’est pas celui qu’aurait souhaité la CFDT, souligne Laurent Berger. Nous n’avons pas la grande réforme systémique que nous appelions de nos vœux, mais nous avons réussi à peser dans les arbitrages. Jusqu’à la dernière heure, nous avons joué le jeu de la concertation afin d’obtenir des mesures de justice. Au final, le projet comporte des efforts significatifs pour faire face au problème du financement des régimes à court et moyen termes, mais aussi des avancées importantes sur la pénibilité, les apprentis, les parcours professionnels précaires et les inégalités entre les hommes et les femmes en matière de retraite. »
Durée de cotisation
Le gouvernement ne touche pas aux bornes d’âge de départ à la retraite (62 et 67 ans) mais souhaite maintenir le principe de l’allongement de la durée de cotisation, dans la droite ligne de la réforme de 2003. D’ici à 2020, il n’y aura aucun changement par rapport à la législation actuelle. À partir de 2020 et jusqu’en 2035, la durée de cotisation exigée permettant d’avoir une retraite à taux plein passera progressivement à 43 ans, à raison d’un trimestre supplémentaire tous les trois ans. Concrètement, les salariés nés en 1973 seront les premiers à devoir cotiser 43 années ; au vu des projections démographiques, il n’est pas envisagé d’aller au-delà. Selon la CFDT, il s’agit d’une mesure exigeante pour les salariés, mais l’organisation se félicite que le gouvernement ait fait le choix de privilégier la durée de cotisation – un critère beaucoup plus juste que le recul des bornes d’âge, qui pénalise les salariés ayant commencé à travailler tôt et qui ont souvent eu des métiers pénibles.
Compte pénibilité
Il s’agit de la mesure la plus innovante du projet, et une véritable satisfaction pour la CFDT, qui s’est battue pendant toute la concertation afin d’obtenir des avancées sur le dossier de la pénibilité. Le gouvernement a annoncé la création, dès le 1er janvier 2015, d’un compte pénibilité qui bénéficiera à tous les salariés du privé exposés à des facteurs de pénibilité reconnus (travail de nuit ou en horaires décalés, exposition à des produits chimiques, au bruit, etc.). Le Premier ministre a annoncé que 20 % des salariés du privé pourraient détenir un tel compte, alimenté par des points. Ces points donneraient ensuite droit à des formations, offriraient la possibilité de partir plus tôt à la retraite ou permettraient d’aménager la fin de carrière. Ce compte serait financé par les employeurs. Un salarié exposé pendant dix ans pourrait « gagner » l’équivalent d’une année à la retraite (avec un plafond à deux ans). Les salariés aujourd’hui proches de la retraite devraient bénéficier d’une bonification de points pour tenir compte de leur parcours professionnel, mais il n’est pas prévu, à l’heure actuelle, que ces comptes soient alimentés de manière rétroactive.
Financement
Le gouvernement a donc fait le choix ne pas augmenter la CSG, mais d’opter pour une hausse des cotisations salariales et patronales. En 2014, elles augmenteront de 0,30 point, puis de 0,10 point en 2015, 2016 et 2017. Cette hausse sera partagée entre les cotisations patronales et salariales. La CFDT, qui s’était opposée à une hausse de la CSG, a été entendue. La CSG n’a en effet pas vocation à financer notre système de retraite par répartition, dont la logique est contributive. Les salariés cotisent et reçoivent en retour un revenu de remplacement lorsqu’ils font valoir leur droit à la retraite.
Les retraités seront également mis à contribution. Le gouvernement a écarté toute désindexation des pensions par rapport à l’inflation ; cependant, ces dernières ne sont plus réévaluées en avril mais en octobre. La majoration de 10 % pour les salariés à partir de trois enfants sera, quant à elle, soumise à l’impôt sur le revenu (dont elle était exonérée jusqu’à présent).
Droits familiaux
Le gouvernement a annoncé une réforme des droits familiaux. Outre la fiscalisation de la majoration de pension pour les personnes ayant élevé au moins trois enfants, le projet prévoit qu’à partir de 2020 cette prime soit plafonnée puis forfaitisée (un montant identique pour tout le monde) et versée dès le premier enfant. La CFDT, qui estime que cette mesure va dans le bon sens, regrette que le gouvernement attende 2020 pour s’attaquer à ce chantier. Le système actuel est en effet particulièrement injuste, car la majoration de 10 % profite principalement aux hommes (à 70 %) et se révèle d’autant plus avantageuse que le montant de leur pension est élevé.
Temps partiel, congé maternité, apprentissage
Le gouvernement a annoncé une mesure qui peut paraître « technique », et pourtant très importante pour les salariés à temps partiel qui touchent un petit salaire (essentiellement des femmes). La règle de validation des trimestres devrait être modifiée : à partir du 1er janvier 2014, 150 heures travaillées au niveau du smic seront suffisantes pour valider un trimestre, contre 200 heures dans le système actuel. Le congé maternité, quant à lui, sera mieux pris en compte dans l’acquisition des trimestres. Dans la même logique, les apprentis acquerront l’ensemble des trimestres qui correspondent à leur formation, quel que soit le niveau de leur rémunération. De fait, il est injuste qu’un apprenti travaille dans une entreprise sans forcément acquérir la totalité de ses trimestres. Parallèlement, le gouvernement envisage de mettre en place une aide forfaitaire pour les étudiants qui souhaitent racheter des trimestres afin de pouvoir partir plus tôt à la retraite sans décote.
Gouvernance du système
Afin de piloter le système et s’adapter à un éventuel dérapage financier des régimes, le gouvernement souhaite mettre en place un comité de surveillance qui sera chargé, chaque année, de faire des propositions d’ajustement si nécessaire. L’idée avancée est de pouvoir adapter les règles, notamment en matière de financement, en fonction de la situation économique (croissance, taux d’emploi, etc.).
Coût du travail
Une réforme du financement de la protection sociale a ainsi été annoncée pour 2014. Le gouvernement a laissé entendre, sans donner beaucoup de précisions, qu’une partie des cotisations de la branche famille (payées par les employeurs) devrait baisser et qu’elles devraient être remplacées par un autre prélèvement qui ne soit pas uniquement assis sur la masse salariale
Pour les petites pensions
Le projet prévoit l’amélioration d’un aspect du minimum contributif. En effet, le minimum contributif n’est versé que si l’ensemble des pensions de retraite personnelles obligatoires est inférieur à 1 028 euros. En cas de dépassement, le minimum contributif est écrêté. Le seuil d’écrêtement sera relevé de 1 028 à 1 120 euros à partir du 1er janvier 2014. Alertée par l’Union confédérale des retraités CFDT (UCR), la délégation CFDT a pesé pour obtenir cette mesure.
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