jeudi 10 janvier 2013

Sécurisation de l'emploi : « des avancées, des désaccords, des manques »


Les partenaires sociaux sont réunis deux jours pour un dernier round de négociation sur la sécurisation de l'emploi. Le chef de file de la délégation CFDT, Patrick Pierron, s'est dit « déterminé pour essayer de trouver un accord ». Explication des principaux points en discussion.

C'est la dernière ligne droite d'une négociation entamée le 4 octobre. Ce 10 janvier, les partenaires sociaux entament le marathon de la dernière chance pour faire prévaloir le dialogue social à la loi sur la question sensible d'une sécurisation de l'emploi qui combinerait des droits nouveaux pour les salariés et des souplesses supplémentaires jugées indispensables par les entreprises. Si rien n'est encore fait, le secrétaire national Patrick Pierron, chef de file de la délégation CFDT, s'est dit « déterminé pour essayer de trouver un accord ».

Des avancées sur la complémentaire santé...
La veille, la délégation patronale a transmis aux organisations syndicales une nouvelle version de projet d'accord qui « va dans le bon sens », estime-t-il : « Il y a des avancées sur de nouveaux droits pour les salariés, mais elles restent insuffisantes. » La partie patronale a notamment fait un pas en avant sur la généralisation de la complémentaire santé pour tous les salariés : à défaut d'un accord au niveau de la branche, les entreprises auraient obligation d'ouvrir une négociation. En cas d'échec, le projet de texte prévoit un socle minimal s'appliquant à tous les salariés... au 1er janvier 2017. Un calendrier jugé bien trop long pour la CFDT, qui souhaite en outre que le panier de soins défini ne soit pas réservé au seul salarié, mais également à ses enfants. Enfin, « les partenaires sociaux doivent maîtriser la définition de la couverture et la clé de répartition de son financement et le choix de l'organisme », indique Véronique Descacq, secrétaire générale adjointe de la CFDT et membre de la délégation.

… et les droits rechargeables
Autre avancée, selon Patrick Pierron, la question des droits rechargeables à l'assurance-chômage, dont la CFDT a fait l'un de ses points durs. Il s'agit de permettre à un demandeur d'emploi de reprendre un emploi sans perdre le bénéfice des droits acquis auparavant. Jusqu'alors, la délégation patronale conditionnait la mise en œuvre de ce nouveau droit, qui bénéficierait tout particulièrement aux salariés précaires alternant contrats plus ou moins courts et périodes de chômage, à une diminution de l'indemnisation des demandeurs d'emploi afin de ne pas grever le déficit déjà exorbitant de l'Unédic. La question du financement est désormais renvoyée à la négociation de la prochaine convention de l'assurance-chômage, qui devra être conclue d'ici le 31 décembre 2013.

Des rédactions à clarifier
De nombreux points demandent par ailleurs à être précisés, réécrits ou mieux encadrés. C'est le cas sur le temps partiel imposé aux salariés, dont les avancées restent insatisfaisante. Or pour la CFDT, il s'agit d'un point crucial dans la lutte contre la précarité. Cela l'est également en ce qui concerne le titre consacrée à l'information et la consultation anticipée des IRP (instance représentatives du personnel), dans lequel la CFDT a accepté que le délai et le coût de l'expertise puissent être négociés, la loi s'appliquant par défaut. « Sur ce point, la rédaction doit être clarifiée pour qu'il n'y ait aucune ambiguïté sur le fait que la loi s'applique par défaut », explique Véronique Descacq. Par ailleurs, la CFDT juge problématique de faire financer le droit à l'accompagnement des IRP par un expert, qu'elle a obtenu, par le budget de fonctionnement des IRP, car ce sont précisément les moins bien loties en la matière qui ont le plus besoin d'un éclairage sur l'information économique et sociale mise à leur disposition.
De même, le principe de mobilité interne acté par le projet d'accord, qui permettrait à une entreprise de changer des salariés de lieu et de poste de travail sans passer par un processus de restructuration, ne peut être que négocié, indique la CFDT.

Des points de désaccords...
Le chef de file de la délégation CFDT a par ailleurs souligné les points de « désaccord » qui demeurent. À commencer par le souhait du patronat d'ouvrir aux entreprises de moins de 50 salariés les CDI intermittents, qui alternent périodes travaillées et non travaillées, et les CDI de projet, qui durent le temps d'une mission (9 mois au minimum selon le projet d'accord en débat).

… objets de blocages patronaux
Le patronat conditionne par ailleurs un éventuel accord à des points dont la CFDT a pourtant demandé la suppression : la création d'un délai d'un an avant la mise en œuvre des obligations liées aux effets de seuil de 11 et 50 salariés ; l'institution d'un « bloc de compétences » qui confierait à la seule juridiction administrative les contentieux relatifs aux plans de sauvegarde de l'emploi ; l'affirmation d'un principe de « prévalence du fond sur la forme ».
Un manque : les contrats courts

« C'est sur l'équilibre global du texte et les droits effectifs nouveaux pour les salariés que la CFDT jugera si un accord est possible », a indiqué à plusieurs reprises Patrick Pierron, chef de file de la délégation CFDT. Or pour l'heure, le projet de texte sur la table se démarque surtout par l'absence d'une quelconque ouverture sur la taxation des contrats courts, dont la CFDT a fait un casus belli. Un point que la délégation patronale a jusqu'alors refusé d'aborder, tant le principe attise les désaccords entre grandes et petites entreprises – et donc entre les organisations patronales qui composent la délégation (Medef, CGPME, UPA). « Notre objectif dans cette négociation, c'est d'infléchir le comportement des entreprises et de pénaliser celles qui ne jouent pas le jeu de l'emploi de qualité et du dialogue social, a rappelé le secrétaire national. Si à l'issue de ces deux jours, il n'y a rien sur ce point, il est impensable qu'il y ait un accord. » 

Aurélie Seigne

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