Philippe Sorret, directeur des filiales France de Groupama, n’élude aucune question, notamment celles portant sur le plan de départ volontaire engagé chez Gan prévoyance et le sort réservé à Amaguiz.
Comment se positionne aujourd’hui Gan Eurocourtage ?
Si les activités Iard ont été cédées à Allianz, Gan Eurocourtage demeure un guichet de choix pour les courtiers en assurance de personnes. Au global, l’entité réalise près de 850 M€ de chiffre d’affaires et distribue ses solutions auprès d’environ 600 courtiers partenaires positionnés sur la protection sociale des chefs d’entreprises et de leurs salariés. L’activité continue de progresser en santé, mais ce sont surtout les segments de la retraite et de la prévoyance qui tirent la croissance. Notre objectif commercial est de clôturer l’exercice avec 50 M€ d’affaires nouvelles, soit un gain net de 5 à 6 % de chiffre d’affaires.
Quelle est votre politique en matière de code courtage ?
Nous avons une politique mesurée d’ouverture de code courtage. Nous préférons travailler régulièrement avec un nombre limité d’acteurs plutôt que de faire des affaires de temps en temps avec une base élargie d’apporteurs. Nous travaillons ainsi avec 400 courtiers actifs en retraite et 150 en collective.
Vous avez récemment lancé une offre "ANI compatible". Quels sont vos objectifs ?
Nous préparons d’ores et déjà l’entrée en vigueur de la généralisation de la complémentaire santé à tous les salariés, prévue au 1 janvier 2016. Nous proposons ainsi notre nouvelle offre dans le cadre des négociations actuellement en cours. Mais nous allons surtout nous efforcer à démarcher les chefs d’entreprises des salariés que nous avons en portefeuille à titre individuel. Il s’agit d’une base de travail prioritaire pour Gan Eurocourtage. Par la suite, nous serons en mesure de proposer aux salariés couverts par leur employeur une surcomplémentaire. Car il y a tout lieu de penser que bon nombre d’entrepreneurs se contenteront du panier de soins minimum tel que défini par la loi. Par contre, nous refuserons de couvrir uniquement le volet complémentaire du salarié si nous n’avons pas le programme de l’entreprise en portefeuille.
L’ANI est donc plutôt bonne nouvelle pour Gan Eurocourtage. Mais qu’en est-il du réseau agents de Gan
assurances ?
Il y a deux cas de figure. Il y a des agents – en gros les trois quarts du réseau – qui se sont plus ou moins spécialisés sur les collectives. Ces intermédiaires sauront rapidement s’adapter à l’évolution du marché et continueront à capter des affaires en collectives. En revanche, il y a environ une cinquantaine d’agents Gan assurances qui avaient fait de la santé individuelle leur grande spécialité. Dans la mesure où ce segment
représente une part significative de leurs encaissements, ils s’inquiètent légitimement du transfert à venir des affaires de l’individuel vers le collectif.
Que comptez-vous faire pour ces agents généraux ?
Gan assurances va opérer un travail important d’accompagnement pour permettre aux agents généraux de rentrer en contact avec des chefs d’entreprise et de se mettre en situation de vente. Pour ce faire, nous avons ouvert un grand chantier leur permettant d’identifier les chefs d’entreprises. L’idée étant de permettre aux agents de compenser le plus vite possible la perte d’activité en individuel par un développement sur les petites collectives.
Plusieurs de vos agents se plaignent du niveau de service et du manque de suivi en assurance vie. Quel est
votre plan d’action pour améliorer la situation ?
Depuis mon arrivé en début d’année, nous nous sommes efforcés d’améliorer la qualité de gestion et à calibrer au mieux le back office en assurance vie. Des investissements ont également été réalisés afin d’optimiser l’organisation. Je peux vous dire aujourd’hui que nous retrouvons progressivement la confiance de nos agents sur le sujet. Nous faisons en sorte que la gestion ne soit pas un handicap à la réalisation d’affaires nouvelles. Certes, tout n’est pas encore parfait, mais je me félicite d’avoir renoué un dialogue constructif avec le Snagan, le syndicat des agents Gan.
Les premiers résultats sont-ils visibles ?
Il est difficile d’inverser les tendances du jour au lendemain. Mais les indicateurs sont bons. En témoigne le taux d’unités de compte dans les affaires nouvelles. Alors qu’il était historiquement très bas au sein du réseau, il se rapproche à grande vitesse des standards de marché.
Et concernant votre réseau Gan patrimoine ? Où en êtes-vous ?
Il s’agit d’un réseau en pleine transformation qui monte en compétence et qui a réalisé 415 M€ de chiffre d’affaires en 2012. Jusqu’à peu, les 400 mandataires réalisaient le gros de leurs affaires sur des fonds euros.
Aujourd’hui, sur les 5 Md€ d’encours, 1 Md€ est orienté sur les UC. Par ailleurs, nous misons sur la diversification du réseau qui est dorénavant capable d’apporter des solutions en défiscalisation, épargne retraite, investissement immobilier… Bref, de proposer tous les produits susceptibles d’intéresser les investisseurs.
Les signaux ne sont pas aussi bons chez Gan prévoyance…
Vous faites sans doute référence au plan de départs volontaire de 170 personnes. Mais je tiens à rappeler que celui-ci vise à simplifier l’organisation et le management du réseau qui compte aujourd’hui 800 salariés, tous spécialisés en santé/prévoyance. L’objectif est de supprimer un niveau d’encadrement – en l’occurrence celui des managers intermédiaires – pour gagner en réactivité et donc en efficacité sur un modèle d’affaires qui a tout de même généré 565 M€ de chiffre d’affaires l’année dernière. Une fois la refonte du réseau terminée, nous aurons à disposition une organisation classique avec des directeurs de régions, des inspecteurs… Le deuxième axe de travail est de rééquilibrer le portefeuille. Aujourd’hui, nous avons 20 % de professionnels et 80 % de particuliers. L’enjeu est d’équilibrer ces deux portefeuilles d’ici à fin 2015.
Vous avez également sous votre responsabilité la marque Amaguiz. Pouvez-vous nous dire concrètement si Groupama mise toujours sur cette filiale ou si vous êtes chargé d’organiser sa sortie du groupe ?
Je vais être très clair : Groupama mise toujours sur Amaguiz. Je vous rappelle qu’à l’époque du lancement de cette filiale, Groupama a parié sur deux fondamentaux. D’une part, une demande des consommateurs pour souscrire en ligne des contrats d’assurance. Et, d’autre part, de construire une plate-forme de gestion efficace susceptible d’être utilisée par d’autres acteurs du marché. Sur ce point, l’histoire nous a donné raison puisque nous avons créé une coentreprise avec La Banque postale assurances pour gérer ses contrats d’assurances dommages. En revanche, sur le premier point, il faut reconnaître que le marché du full web n’a pas connu l’essor espéré puisque seulement 3 à 4 % des assurés utilisent exclusivement internet pour acheter leur contrat d’assurance auto et/ou MRH.
Quels enseignements en tirez-vous ? Avez-vous revu vos objectifs à la baisse ?
Face à un marché du "vrai direct" qui ne croît pas, nous avons pris deux décisions fortes. Premièrement, d’arrêter nos investissements publicitaires. Outre l’économie réalisée, nous considérons que nous avons acquis une notoriété suffisante pour attirer des internautes. Deuxièmement, nous avons revu la trajectoire et le plan d’affaires pour atteindre le point mort. Initialement, nous espérions dégager une rentabilité en atteignant le seuil des 500 000 polices à horizon 2015. Compte tenu de l’environnement de marché, nous avons abaissé ce chiffre à 350 000 contrats. Pour rappel, nous en avons aujourd’hui 209 000 en stock.
Comment est-il possible de modifier ainsi la feuille de route ?
Car nous ciblons une clientèle différente, moins attirée par le prix. Par exemple, en habitation, nous avons beaucoup d’étudiants. Nous nous efforçons aujourd’hui d’attirer d’autres typologies de clientèle, comme des familles. L’objectif, vous l’avez compris, étant d’avoir une prime moyenne par assuré plus élevée. Aussi, nous cherchons par une plus grande sélectivité dans les affaires à améliorer les résultats techniques. Enfin, nous travaillons la vente additionnelle. A l’heure où je vous parle, 80 % de notre clientèle est monoéquipée. Ce n’est pas satisfaisant! L’objectif est que moins de la moitié de nos clients ne dispose que d’un seul contrat chez nous. Le fait de disposer d’une plate-forme et d’un back office efficace nous permettra, j’en suis convaincu, d’atteindre les objectifs fixés par Groupama pour Amaguiz.
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